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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

coup de plaisir de mon voyage dans les États-Unis. Deux d’entre eux, propriétaires d’esclaves, ayant de belles et énergiques figures, m’invitent à venir dans le Sud et m’assurent que je verrai dans les esclaves la population la plus heureuse et la plus digne d’envie.

Les jours se passent avec calme et d’une manière agréable. La seule chose qui m’offusque dans la vie à bord du Canada, c’est qu’on y boit et mange d’une manière absurde.

Lundi, 1er octobre.

Dixième jour de mer. Le temps est un peu moins agréable ; vent et fracas des flots. Nous eûmes hier ce qu’ils appellent « un vent frais. » J’essayais vainement de me tenir debout sur le pont ; je n’ai pas été créée pour être matelot, il faut en convenir. Nous passons près de Newfoundland, et cinglons autant au nord afin d’éviter les tempêtes de l’équateur au sud. Mais le vent, devenu contraire, est fort depuis plusieurs jours, de sorte que notre traversée ne sera pas aussi prompte que son début nous le faisait espérer. Nous n’arriverons que demain à Halifax, et nous y resterons une couple d’heures, afin de mettre à la poste nos lettres pour l’Europe (j’apprête celle-ci pour ma famille) ; puis nous mettrons le cap au sud, droit sur New-York. Je me porte très-bien, je n’ai pas eu un seul instant le mal de mer ; cependant, le soir et la nuit, quand les vagues font tant de bruit, quand elles passent par-dessus nos têtes et que le navire craque et crie, j’éprouve un peu de malaise. Heureusement la société des femmes, dont je viens de te parler, est agréable, récréative, et le soir trois voix, dont deux se sont rencontrées ici pour la première fois, celle de la dame âgée, qui n’est pas précisément