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LA VIE DE FAMILLE

M. Hamilton m’emmena visiter quelques-uns des petits cultivateurs ou métayers des environs, afin de me donner une idée de leur position. Nous arrivâmes chez plusieurs d’entre eux à l’heure du diner, et je vis leur table richement fournie de viande, de gâteaux, de maïs, de légumes, de fruits et du plus beau pain de froment. Les maisons étaient pour la plupart une espèce de construction particulière en bois, agréablement bâties. Les chambres sont claires, propres, elles ont de grandes fenêtres. J’étais enchantée de causer avec M. Hamilton, qui sait beaucoup de choses sur ce pays; c’est un ami ardent de ses institutions, dont il a eu l’occasion de reconnaître l’utilité durant sa longue carrière administrative. La journée était belle, un peu froide au vent, et n’avait rien de ce que tu appelles «un air bien mélangé!» Il a quelque chose de si vif, de si pénétrant ici, que j’en suis pénétrée comme je ne l’ai jamais été en Suède.

Il y eut beaucoup de monde à diner; parmi les convives se trouvait Washington Irwing. C’est un homme de soixante ans environ. Il a de jolis yeux, un grand nez bien fait, une figure encore agréable sur laquelle des fossettes et sourires jeunes rendent témoignage de la jeunesse de l’âme et de l’esprit. Son caractère est, dit-on, des plus heureux et son cœur excellent. Irwing s’entoure d’une foule d’enfants appartenant à ses frères et sœurs, plus particulièrement des filles dont il fait le bonheur et qui le rendent heureux par leur affection (il ne comprend pas la nécessité des garçons). On assure qu’il est doué de la faculté spéciale de trouver bien tout ce qu’il possède et lui arrive. C’est un optimiste, mais non pas de ceux qui s’aiment eux-mêmes. Nous étions voisins à table, et je ne lui en veux pas de s’être laissé aller au sommeil; on m’avait prévenue que