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Page:Bremer - La vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 2.djvu/126

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LA VIE DE FAMILLE

nombreuse assistance lui adressa des encouragements qui le ranimèrent. Il reprit la parole, et se borna à raconter l’histoire de son ancienne misère et la conduite de la petite Hanna envers lui. La simplicité de la narration, sa beauté intime, la profonde émotion de l’homme qui la faisait, tout cela émut fortement l’auditoire. Les Washingtoniens se levèrent l’un après l’autre et prononcèrent des paroles tirées de la vérité intime de la vie et du cœur. Une voix dans la foule s’écria : « Y a-t-il aussi de l’espoir pour moi ? — Oui, oui ! lui fut-il répondu ; viens, frère, viens signer cet écrit. Nous te soutiendrons ! »

Des milliers d’individus signèrent ce soir-là l’acte de tempérance. Le bon Marcus me dit qu’animé lui-même, ému par cette scène, il s’était levé pour exprimer sa joie, mais qu’après avoir prononcé deux paroles, — il resta court, oublia ce qu’il voulait dire, et s’assit en prenant la ferme résolution de ne jamais se présenter comme orateur.

Hawkins continue à parcourir le pays, à prêcher la tempérance. Il a maintenant de l’aisance, est considéré. Sa fille est, dit-on, avec lui dans l’Ouest ; ce n’est plus la pâle Hanna, mais une florissante jeune personne de seize ans.

Il y avait un peu de monde hier au soir chez le général Stuart, entre autres une mademoiselle *** (j’ai oublié son nom). C’est une femme d’un certain âge, fort aimable, d’un cœur chaud, d’un esprit frais, nature magnifique. Elle est fille d’un propriétaire d’esclaves, et riche. À sa majorité, elle a émancipé ses esclaves, en leur donnant à chacun (ils étaient vingt et quelques) une sorte de dot, pour les mettre à même d’embrasser une carrière indépendante. Elle m’a raconté qu’un de ces esclaves, un nègre, s’était toujours fait remarquer par sa bonne conduite, et avait,