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LA VIE DE FAMILLE

très-favorable à la décence, est fort désavantageux à la beauté, « au souverain ou à la souveraine de la création. »

Je fus d’abord comme effrayée par cette scène, cette compagnie, par ce qu’elle avait de laideur et de grossièreté apparentes. Mais j’aspirais après les forces que donne la mer, et me disais : « Nous sommes tous, aux yeux du Seigneur, pécheurs, petits, pauvres et misérables. » Et je me mêlai aux autres. Le flot arrive comme un géant, mais il est bon, doux et puissant ; lorsque je me sens submergée par lui, je pense, involontairement, qu’il ne serait pas difficile de mourir au milieu de ces vagues. Sois sans inquiétude, mon Agathe, je prends soin de moi, et d’autres aussi veillent sur ma personne, car j’ai ici de bons amis, quoique j’en tienne une partie à distance, afin de goûter un peu de repos.

Je me trouve parfaitement avec M. et madame Hart : ils sont amicals, paisibles, sérieux, me laissent la liberté de faire ce que je veux. J’ai une jolie petite chambre à côté de la leur, avec vue sur l’Océan, qui, sans îles, sans brisants, se heurte contre le rivage sablonneux. Par ma fenêtre ouverte, j’entends son mugissement jour et nuit. (Depuis plusieurs mois je dors les fenêtres ouvertes, mais les jalousies fermées : c’est l’usage général en Amérique.) Je ne me suis pas encore aussi bien reposée dans ce pays, que je le fais ici, car je dispose de ma personne.

Le 20 août.

Qu’il est doux de ne pas être obligée de sortir pour voir, ni de faire des efforts pour écouter et apprendre, de pouvoir être seule, silencieuse et tranquille ! Et l’Océan, l’Océan, le