rive néanmoins tous les ans, par suite de l’imprudence des baigneurs qui, ne sachant pas nager, s’avancent trop. L’attraction de la mer, quand elle se retire du rivage après l’avoir heurté, est encore plus forte que le coup du flot ; elle vous hume véritablement vers l’abîme. C’est l’unique danger de cette côte. Les marsouins ne sont pas méchants ; il n’y a de requins qu’à table.
Un naufrage qui a eu lieu récemment non loin du Cap-May a brisé l’espérance de bien des cœurs et fait une impression profonde sur des milliers d’individus dans les États du Nord-Est. Pendant une nuit orageuse du mois de juillet, a péri sur un écueil de la côte du New-Jersey le brick sur lequel était la marquise Ossoli (Margaret Fuller), l’objet de tant de calomnies, de commérages, d’admiration. Elle revenait dans les États de la Nouvelle-Angleterre, sa patrie, avec le marquis Ossoli et leur jeune enfant. Ils ont tous péri, après avoir vu pendant quatre heures les flots mettre en pièces le navire et la mort approcher. Je crois t’avoir parlé de la lettre de Margaret Fuller, écrite de Gibraltar aux Spring, de ses tristes pressentiments, de la mort du capitaine, etc. Le navire avait été ensuite commandé par le premier contre-maître, jeune et habile marin, si sûr de son affaire, que la veille au soir il avait promis aux passagers d’arriver le lendemain matin à New-York. Tous se couchèrent et ne se réveillèrent qu’au point du jour, au moment où le navire toucha : le pilote s’était trompé de phare. On n’était pas loin de terre et les vagues déferlaient vers la côte. Plusieurs passagers s’étant fait attacher à des planches atteignirent, quoique demi-morts, le rivage. Ce moyen de salut fut proposé à Margaret Fuller. Elle le refusa, ne voulant pas se sauver sans son mari et son enfant. En s’embarquant en Italie, elle avait