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Page:Bremer - La vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 2.djvu/339

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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

Le 7 novembre.

À peine arrivée, j’ai été obligée de me coucher par suite d’une migraine. Mademoiselle S… m’a soignée comme une sœur aurait pu le faire. Bientôt remise, je suis allée faire une visite du matin chez les fiancés, ils demeurent dans cet hôtel. La pièce dans laquelle se trouvait la jeune personne était assombrie et faiblement éclairée par le feu. La fiancée est grande, svelte, trop maigre, du reste jolie ; elle a un teint florissant, tout en ressemblant à une fleur de serre chaude, peu en état de supporter l’air libre. Ses doigts effilés jouaient avec de petits objets précieux attachés à une chaine en or qui descendait du cou jusqu’à la taille. Son costume était riche et du meilleur goût ; on aurait dit un objet de luxe plutôt qu’une future maîtresse de maison. La faible clarté, la chaleur du feu, les parfums, tout ce qui entourait cette jeune personne annonçait de la mollesse. Le fiancé paraissait très-épris de sa future, qu’il devait conduire d’abord à Cincinnati, puis vers la Floride et son été éternel. On m’offrit du gâteau et du vin doux.

Lorsque je sortis de cette chambre parfumée et de son demi-jour, je trouvai un ciel bleu, un air d’été, du soleil, et j’entendis gazouiller les oiseaux dans les arbres qui murmuraient. C’était ravissant. « Ah ! pensais-je, voilà un autre spectacle. » Elle n’est pas bonne, pas naturelle, la vie de crépuscule que mènent beaucoup de femmes dans ce pays. Près du feu pendant toute l’année, et assises dans de commodes chaises berçantes, cette vie d’oisiveté les sépare de l’air extérieur frais et fortifiant. On doit attribuer en grande partie la faiblesse physique des femmes d’ici