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Page:Bremer - La vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 2.djvu/58

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LA VIE DE FAMILLE

un peu d’instruction sur une matière suffit pour connaître et comprendre beaucoup de choses. Comme nous étions sur ce chapitre, le domestique introduisit un petit homme singulier tenant à la main une canne ressemblant à un bâton noueux et à une baguette magique. « Ce doit être quelque prodige du Grand-Ouest ! » pensai-je. (Nous étions assis les portes ouvertes.) « Êtes-vous Henry Clay ? » demanda le petit homme en se plantant, ainsi que son bâton noueux, devant le grand homme. « Oui, monsieur, c’est mon nom, répliqua celui-ci avec impatience. Asseyez-vous. Que me voulez-vous ? » — Le petit homme s’assit sans gêne dans un fauteuil, et je me levai en manifestant à Clay ma crainte de l’importuner. « Oh ! non, non ! dit-il poliment. C’est si réconfortant la société des femmes ! Mais ces hommes, — je les hais ! » Et il fit vers le petit homme un geste qui aurait dû le faire sortir ou l’égaliser avec le plancher s’il l’eût compris ; mais il paraissait fermement décidé à ne pas se laisser troubler. J’abandonnai donc l’homme d’État fatigué au lutin. Clay, populaire au plus haut degré, laisse pénétrer tout le monde jusqu’à lui, et paraît en même temps accablé par les gens qui abusent de son temps et de son obligeance. On assure qu’il est maintenant plus irritable et impatient qu’on ne l’a jamais vu. Quelle vie ! Et cependant les hommes courent après elle !

J’ai visité aujourd’hui avec Judge Berrian, sénateur de la Géorgie, homme d’esprit et fin (malheureusement partisan de l’esclavage, mais du parti des patriarches, je crois), la bibliothèque du Capitole, grande et belle salle, avec une vue magnifique, et pièce de réunion générale pendant les sessions, lorsque les membres du Congrès peuvent s’y reposer et causer avec leurs connaissances. On y