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Page:Bremer - La vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 3.djvu/143

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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

nant en même temps le matin leur café accompagné d’un pain blanc. Ils me paraissent pour les formes et l’extérieur plus petits et insignifiants que bien des noirs. Dans les États à esclaves de l’Amérique du Nord, il est impossible de se faire une idée de la beauté africaine, surtout dans certaines tribus. Les esclaves indigènes qui s’y trouvent forment une race dégénérée, le corps sauvage s’est apprivoisé.

Plusieurs des esclaves amenés à Cuba sont des princes ou des chefs, et les membres de leurs tribus qui les accompagnent en esclavage leur témoignent toujours une obéissance et un respect profonds. Un tout jeune prince de la tribu des Lucomans avait été amené dans une plantation avec dix autres Lucomans, et condamné un jour à être puni. Suivant l’usage, les autres devaient assister à son châtiment. Lorsque le prince fut couché à terre pour recevoir des coups de fouet, tous ses compagnons s’étendirent à côté de lui et demandèrent à partager sa punition. Cette touchante preuve de dévouement inspira seulement aux grossiers bourreaux la brutale promesse « que ces noirs ne manqueraient pas de recevoir leur part entière de coups de fouet quand l’occasion s’en présenterait. » Ceci ne s’est point passé dans cette plantation.

Avant de quitter le bohen, je te dirai quelques mots de son administration et de sa population. Elle dépend d’abord du maître, ensuite du surveillant, puis du sous-surveillant, qui est parfois un nègre. Dans les grandes plantations comme celle-ci, on a plusieurs surveillants ou seconds, blancs. La disposition d’esprit des esclaves et leur situation dépendent beaucoup de la capacité, de la raison, de l’humanité des surveillants. Mais il arrive souvent à Cuba que la mort cruelle du surveillant rend témoignage