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Page:Bremer - La vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 3.djvu/311

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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

verdoyantes, bien, bien avant dans le pays. La vue est superbe de ce magnifique Capitole ! Je voudrais que l’état intellectuel de la ville où siége le gouvernement y répondit. Mais la Virginie est un État à esclaves, ses idées et le courant de sa vie coulent, comme cela se pratique dans tous les États à esclaves, seulement pour la moitié de sa population. On s’en souvient sur-le-champ à la porte du parc du Capitole. Sur les montants de cette porte est affichée une ordonnance annonçant en grandes lettres que tout esclave qui osera la dépasser recevra trente-neuf coups de fouet. Dans les États à esclaves on ne peut jouir de rien sans être troublé par ces coups de fouet.

Mais, sous le rapport matériel, comme l’Amérique du Nord est bien arrosée ! Partout de grands fleuves navigables qui, semblables à des artères, reçoivent dans leur sein des rivières, des ruisseaux sans nombre et portent en tous lieux la vie et les fruits de la civilisation !

Je me suis séparée de ma bonne madame Howland (elle m’est devenue aussi chère qu’une sœur) et de sa famille avec une douleur que je cherchais à ne pas écouter, car il fallait nous séparer.

C’est dans l’après-dînée du 12 juin que j’ai quitté Charleston et la Caroline du Sud. La mer était houleuse, et le bateau tellement encombré de passagers, que je me suis repentie intérieurement d’avoir cédé au désir d’être avec madame Holbrook sur ce navire, et de n’avoir pas différé mon départ d’une couple de jours. Je craignais maintenant de gêner les autres et de l’être moi-même. Mais madame Holbrook est devenue ma consolation et mon aide. Connaissant la négresse qui servait dans le salon des femmes, elle lui fit dresser pour nous des lits sur des siéges moelleux près de la fenêtre, car toutes les cabines