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LA VIE DE FAMILLE

y aller aussi plus avant dans l’été, non pour prendre les eaux, mais pour voir cette scène de la société américaine, qui en représente, dit-on, la plus mauvaise face : l’immoralité froide fashionable, et le manque de conscience en habits de gala.

Plus tard.

Quel sermon ! — s’il était l’unique source de la connaissance de Dieu, il ferait des hommes des athées ou des têtes de choux. Quant à moi, il m’a impatientée, irritée. Le jeune prédicateur vidait, avec une grande satisfaction de lui-même, si j’en juge par sa personne, le calice de la colère rempli de menaces et de châtiments, en parlant des pécheurs en dehors de son Église. L’auditoire était peu nombreux, une partie dormait, quelques messieurs bien nourris et bien vêtus, assis dans un banc en face de moi, tiraient de temps en temps leur montre pour voir si l’heure du dîner approchait, du moins je le présume, car évidemment ils ne songeaient pas au jugement dernier, quoique le jeune ministre s’en servit avec fracas, ainsi que des châtiments futurs dont les impies seront frappés. Il est bon d’ajouter que le prédicateur se renfermait tellement dans l’abstrait et le vide que toutes ses peintures du péché passaient pardessus la tête des personnes assises sur les bancs. Mais — j’ai entendu bien des prêtres prêcher pour un autre auditoire que le leur.

Je resterai ici une couple de jours, puis j’irai faire une visite à notre compatriote le professeur Sheele de Vere, à Charlotteville ; c’est l’université de la Virginie, mais je reviendrai ici pour y passer quelque temps.