la même depuis ce chagrin ! » Et les yeux de Betzy se mouillent de larmes.
Malgré l’amour dévoué de l’esclave et quoique madame Le Vert ne voie dans sa maison et celle de sa mère que des esclaves heureux, elle fait cependant partie des personnes dont le bon cœur et la raison n’ont point été égarés ni trompés relativement à ce qui est bien ou mal. Elle exprime simplement et avec gravité, toutes les fois que l’occasion s’en présente, sa conviction que « l’esclavage est un mal. » Nous sommes sur ce chapitre d’un accord parfait.
Nous avons fait le projet d’aller ensemble à Cuba ; c’est pourquoi nous partirons de bonne heure demain pour la Nouvelle-Orléans, afin de nous embarquer le 14 au matin sur le bateau à vapeur le « Pacific ». Les palmiers de Cuba rafraîchiront le visage d’Octavie, fatigué par les larmes, et appelleront de nouvelles roses sur ses joues ; ses yeux jolis et beaux reprendront leur éclat en se levant vers ce ciel sans nuage, — et nous causerons ensemble avec calme de ce qui pourra la rendre heureuse et plus gaie que par le passé, quand je ne serai plus auprès d’elle. Tel est mon rêve et mon espoir.
Avant de m’éloigner de la jolie ville où je me suis si bien trouvée, je te dirai que l’Alabama est un État à coton ; qu’il a, au sud, des plantations, des terres sablonneuses, d’importantes forêts de pins, et, au nord, de jolies montagnes (les monts Alleghany s’abaissent et finissent ici) et des prairies. On fait l’éloge de la contrée qui longe ses cours d’eau navigables, et surtout de la rivière de Mobile, qui conduit à Montgommery, la capitale politique de l’Alabama. J’ai été fort tentée de la remonter, mais le temps, le temps… Les chemins de fer, les bateaux à vapeur, les écoles, les universités, commencent à répandre la lumière