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Page:Bremer - La vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 3.djvu/90

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LA VIE DE FAMILLE

n’a pas eu le pouvoir d’empoisonner sa nature, et le sang de ses premiers habitants inoffensifs crie encore vers le ciel ; mais ces gémissements ressemblent à une belle mélodie, elle a donné le nom de Yumori à la plus jolie vallée de Cuba.

Parmi les souvenirs que les Indiens ont laissés à Guanavacoa, est une sorte de vase en terre qu’ils fabriquaient avec la glaise poreuse que l’on trouve dans cet endroit, et qu’on y fabrique encore. Ils sont fort en usage à Cuba pour conserver l’eau à boire fraîche dans les chambres. L’eau s’évaporant du vase par ses pores, on a soin de l’envelopper d’un linge qui se maintient toujours humide, et l’eau est fraîche mais non pas froide. Le manque de bonne eau à boire est une calamité de Cuba. On n’y fait pas encore usage de glace pour la rafraîchir, excepté dans les grands hôtels de la Havane.

Le jour où nous sommes allés à Guanavacoa étant beau, la course fut agréable ; mais je n’en ai pas joui complétement. Je me sentais affaiblie par deux nuits blanches dont j’étais redevable à la chaleur et aux cousins ; je suis toujours dans un état de somnolence, et me souviens de ce bourg comme d’une miniature de la Havane ; ses maisons étaient construites et peintes de même ; elles avaient les mêmes toits et terrasses supérieures ornées d’urnes ; mais tout cela est petit. Le pays m’a paru ressembler à un vaste champ ondulé parsemé de palmiers et de petits enclos. Au fond, et vers l’intérieur de l’île, on voyait se dresser la chaîne de montagnes qui la traverse de l’est à l’ouest ; c’est le trait saillant de son paysage. Les cimes les plus élevées de cette chaîne, le Potullo et le Combre, ont plus de huit mille pieds, dit-on, d’élévation.

Ces forteresses naturelles de Cuba ont un intérêt romantique et sombre qui leur est particulier. Des esclaves fugi-