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Page:Bremer - La vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 3.djvu/98

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LA VIE DE FAMILLE

taires dans les environs ; quoique ce ne soit pas l’usage ici qu’une femme, — surtout si elle porte chapeau, — se serve de ses jambes au lieu de celles d’un cheval attelé à la volante pour se promener. Malgré les enfants nègres, filles et garçons, qui couraient après moi en riant et criant, et quoique les personnes faites s’arrêtassent ébahies pour me regarder et que je fisse peur aux chevaux et aux bœufs, je n’en continuai pas moins mes excursions. On commence cependant à s’habituer de me voir dehors. Je ne voudrais pas pour beaucoup renoncer à mes découvertes.

Veux-tu m’accompagner dans l’une d’elles, la première et la plus délicieuse que j’ai faite un matin de bonne heure, où j’ai parcouru seule la vallée de Yumori ? Il va sans dire que la matinée était belle, mais à quel point elle l’était, c’est ce que personne ne comprendra, à moins d’avoir joui de ce beau matin, des caresses du vent de la baie de Matanzas. La vallée de Yumori est à deux cents pas de la ville. Entre deux rochers est une ouverture par laquelle passe une petite rivière limpide ; elle coule entre des rives verdoyantes pour se réunir à la mer. Je ne dis pas qu’elle s’y jette, son cours est trop paisible pour que cette expression puisse lui être appliquée : elle est calme comme un miroir. Suivons-la. Au delà de l’ouverture formée par les rochers, le champ est libre et la vaste baie de Matanzas se présente couverte de navires de toutes les nations du monde, à voiles, à l’ancre, au loin, bien loin au large.

Nous longeons la rivière. Alors s’ouvre une vallée merveilleuse remplie de palmiers, de buissons et de champs verdoyants enfermés de deux côtés par de hautes chaînes de montagnes. Leur ombre s’étend fraîche et obscure sur