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LES PETITES MISÈRES DE LA VIE CONJUGALE

Un ami vous parle d’une jeune personne : « Bonne famille, bien élevée, jolie, et trois cent mille francs comptant. » Vous avez désiré rencontrer cet objet charmant.

Généralement, toutes les entrevues fortuites sont préméditées. Et vous parlez à cet objet, devenu très timide.

Vous êtes admis à courtiser la jeune personne.

Vous. — Une soirée charmante !…

Elle. — Oh ! oui, monsieur…

La belle-mère, au futur. — Vous ne sauriez croire combien cette chère petite fille est susceptible d’attachement.

Cependant, les deux familles sont en délicatesse à propos des questions d’intérêt.

Votre père, à la belle-mère. — Ma ferme vaut cinq cent mille francs, ma chère dame !…

La belle-mère, au futur. — Vous ne sauriez, mon cher monsieur, est à un coin de rue.

Un contrat s’ensuit, discuté par deux affreux notaires : un petit, un grand. Puis les deux familles jugent nécessaires de vous faire passer à la mairie, à l’église, avant de procéder au coucher de la mariée, qui fait des façons. Et après !… il vous arrive une foule de petites misères imprévues, comme ceci :

le coup de jarnac

Est-ce une petite, est-ce une grande misère ? je ne sais ; elle est grande pour les gendres ou pour vos belles-filles, elle est excessivement petite pour vous.

— Petite, cela vous plaît à dire ; mais un enfant coûte énormément ! s’écrie un époux dix fois trop heureux qui fait baptiser son onzième, nommé le petit dernier, — un mot avec lequel les femmes abusent leurs familles. Quelle est cette misère, me direz-vous. Eh bien, cette misère est, comme beaucoup de petites misères conjugales, un bonheur pour quelqu’un. Vous avez, il y a quatre mois, marié votre fille, que nous appellerons du doux nom de Caroline, pour en faire le type de toutes les épouses. Caroline est, comme toujours, une charmante jeune personne, et vous lui avez trouvé pour mari : Soit un avoué de première instance, soit un capitaine en second, peut-être un ingénieur de troisième classe, ou un juge suppléant, ou encore un jeune vicomte. Mais plus certainement, ce que recherchent surtout les familles sensées, l’idéal de leurs désirs : le fils unique d’un riche propriétaire !… (Voir la Préface’). Ce phénix, nous le nommerons Adolphe, quels que soient son état dans le monde, son âge et la couleur de ses cheveux. L’avoué, le capitaine, l’ingénieur, le juge, enfin le gendre. Adolphe et sa famille, ont vu dans mademoiselle Caroline :

1o  Mademoiselle Caroline,

2o  Fille unique de votre femme et de vous.

Ici, nous sommes forcé de demander, comme à la Chambre, la division ;

I — de votre femme

Votre femme doit recueillir l’héritage d’un oncle maternel, vieux podagre quelle mitonne, soigne, caresse et emmitoufle, sans compter la fortune de son père, à elle. Caroline a toujours adoré son oncle qui la faisait sauter sur ses genoux, son oncle qui… son oncle que… son oncle enfin… dont la succession est estimée à deux cent mille francs.

(à suivre)