Page:Brizeux - Œuvres, Histoires poétiques I-II, Lemerre.djvu/237

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Quel amour retenait l’hirondelle obstinée
Dans un trou ténébreux de cette cheminée,
D’où ses plaintes tombaient jusqu’au fond du foyer
Près duquel méditait un vieillard prisonnier ?
Lamennais ! — C’était lui dont la pensée active
Sous les pesants verrous ne restait point captive.
La bise cependant, parmi ces rêves d’or,
Tristement murmurait dans le long corridor,
Et le penseur voulut voir pétiller la flamme,
Pour réjouir un peu son corps faible et son âme ;
Mais, lorsque la fumée emplit le tuyau noir,
Un cri monta dans l’air, un cri de désespoir ;
Et l’hirondelle, allant du toit à la fenêtre,
Suspendue aux barreaux, semblait gronder le Maître.
Le Maître ! un prisonnier !… Il s’émut toutefois,
Et sa main doucement jeta l’eau sur le bois.
En vain gronda la bise, en vain depuis novembre
Jusqu’en mars pluie et neige assiégèrent la chambre :
Le tison resta mort. Blotti sous son manteau,
Le sage tendrement souffrit pour un oiseau ;
Mais, au moindre rayon, pour son ami fidèle
Gaîment au bord du toit gazouillait l’hirondelle.

III

Tel était ce vieillard ; et, devant son cercueil,
Combien vont le charger d’impiété, d’orgueil !
Non ! — Un esprit superbe, un cœur plein de tendresse
Un Celte pris soudain d’une invincible ivresse,