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La Licorne


PORTRAIT DE LA LICORNE


Merveilleux animaux, cerfs aux ramures d’or,
Vous, dragons écaillés veillant sur un trésor,
Oiseaux devins, poissons dont la voix étouffée
Éclatait pour répondre à la voix d’une fée,
Êtres évanouis, chers aux bardes anciens,
Vous viviez dans leurs vers, renaissez dans les miens !
Au féerique troupeau je mêle la licorne,
Cette fille des monts d’où sortit pour l’Arvor
L’idiome sacré que nous parlons encor :
Là, sur l’Himalaya, près du Gange sans borne,
Celle qui sur le front a pour arme une corne
Errait libre, sauvage, hostile à l’éléphant.
La trompe en vain bravait le glaive triomphant,
Car l’animal subtil, près de se mettre en guerre,
Aiguisait avec art son arme sur la pierre.
Puis elle revenait sous le rameau bénit
Où le ramier paisible avait posé son nid.
Et, fermant ses yeux clairs, se couchant sur la mousse,
Heureuse elle écoutait roucouler la voix douce.