Page:Brizeux - Œuvres, Histoires poétiques I-II, Lemerre.djvu/46

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Quels transports surhumains quand le marbre en éclats
Tombe, comme tombaient les barbares soldats !
L’artiste libre et fier et roi de son génie,
Lorsqu’il travaille, entend une douce harmonie :
Une muse l’anime et découvre à ses yeux
Sous la pierre jalouse un corps mystérieux.

premier statuaire.

« Que le dieu soit assis ; que sa tunique étroite
L’entoure jusqu’aux pieds sans plis et toute droite ;
Que le long de son corps ses deux bras soient liés,
Et qu’un lien pareil rapproche ses deux pieds ;
Que ses yeux sans regard, sa bouche sans parole,
De l’immobilité soient l’effrayant symbole :
Les peuples apprendront, en contemplant leur dieu,
due tout est immuable, éternel en ce lieu ;
due la loi règle tout, jusqu’à l’air de la face ;
Qu’on doit vivre immobile et muet, à sa place. »

second statuaire.

Apollon, jeune dieu qui sais lancer les traits
Et suis ta sœur Diane à travers les forêts,
Intrépide coureur à la taille élancée,
Chantre à la lyre d’or, ô dieu de la pensée,
Du bloc qui te retient sors léger, triomphant,
Ta chlamyde flottante abandonnée au vent !
Sur ton front, dans tes yeux, que la Grèce ravie
Admire, en t’adorant, le mouvement, la vie !
Ô dieu jeune, dieu libre, ô dieu plein de beauté.
Montre-nous comme on marche avec grâce et fierté !