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III

Vous mourrez sur votre or, nouveaux païens du monde,
Desséchés dans les bras de votre idole immonde !
Vous fuyez l’idéal, l’idéal vous a fuis.
Sur vos calculs sans fin et vos sombres ennuis
Le ciel n’épanchera ni concerts, ni rosée,
Et votre avare soif ne peut être apaisée.
Vous, déserteurs d’un Dieu pauvre et mort sur la croix,
Qu’on rencontre toujours sur l’escalier des rois,
— Près du Samaritain jamais, ni dans l’étable, —
Qui chasseriez Lazare encor de votre table,
Dans vos parcs somptueux et vos palais dorés,
Courbés sous vos honneurs, mais tristes, vous mourrez !

IV

Eux, ils ne mouraient pas, affirme la légende,
Tant l’amour, qui faisait leur âme douce et grande,
Répandait sous leur chair un sang limpide et fort !
Ils semblaient doublement à l’abri de la mort.
Sous l’amas des hivers pourtant leurs têtes blanches
Par degrés se penchaient ; neigeuses avalanches,
Leurs barbes à flocons descendaient sur leurs pieds.
Ils crurent à la fin leurs péchés expiés ;
Après tant d’oraisons, d’aumônes et de jeûnes,
Ils désiraient mourir pour ressusciter jeunes.
Alors le bon abbé, venant à leur secours.
Supplia tant le ciel de délier ses jours,