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II


Histoire de Nola racontée, dans une aire neuve,
entre deux commères. Ce qu’elles augurent pour Primel.


Un village voisin a fait une aire neuve ;
Et son deuil finissant, la riche et belle veuve
Est venue à la fête, où, pour lui faire honneur,
On avait invité certain jeune seigneur ;
Besoin n’était : chasseur, il n’ignore aucun gite ;
Une dot, le galant la flaire encor plus vite.
Monsieur Flammik aussi, clerc à demi bourgeois,
Étourdissait chacun des éclats de sa voix ;
Tout fier du poil nouveau qui tremble sur sa joue,
Il passait, repassait, pigeon qui fait la roue.
Et bien d’autres encor, jeunes, vieux, de tous rangs,
Roulaient des yeux : c’était une foire aux galants.
Mais elle, sans rien voir, laissait errer sa vue,
Tout entière, il semblait, dans ses rêves perdue :
Charmante, ce jour-là, sous ses vêtements bleus,
Sa robe d’un bleu clair, non moins clair que ses yeux,
Et sa coiffe de lin qui sur son col s’épanche,
Moins pourtant que son col éblouissante et blanche.
Pour Primel, que Flammik se plaisait à railler,
Il n’avait, on l’eût dit, qu’un souci, travailler :
Toujours l’oreille ouverte au fermier qui l’appelle,
Et promenant partout les râteaux et la pelle.