Page:Brizeux - Œuvres, Les Bretons, Lemerre.djvu/119

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Bretagne de l’Arvor, que ta lutte fut belle,
Au joug des conquérants terre toujours rebelle !
Durant onze cents ans, combattant sous tes rois
Et sous tes ducs guerriers, tu défendis tes droits.
Nul vainqueur n’enchaîna la douce et blanche hermine ;
D’elle-même elle offrit sa royale étamine
Et sa couronne d’or, où l’on voyait fleurir
La devise : « Plutôt que se souiller, mourir ! »
Pourtant, frère, vivons ! Aux vieilles mœurs fidèles,
Marchons sans nous souiller dans les routes nouvelles ;
Et ne fuyons pas Dieu, source de l’unité,
D’où découlent la paix et la fraternité.

Tout à coup le marin : « Hommes pleins de sagesse,
Vos voix ont un aimant qui m’attire sans cesse.
Tous deux, je vous connais. Vous, honnête pasteur,
Je vous ai vu dans Scaer prêcher comme un docteur,
Ce jour de malencontre où des buveurs de cidre,
Sans Lilèz que voici, m’étouffaient comme une hydre.
Quant au frère étranger, notre cher commensal,
Je dis que sur la harpe il n’a point son égal.
Oui, lorsque mon vaisseau me porta dans son île.
Je vis en plus d’un lieu plus d’un concert habile ;
Mais à ce grand concert de bardes et d’amis
Où, comme un frère ancien, Breton, je fus admis,
Sa harpe, qui murmure encore à mon oreille,
Mêlée aux sons des vers, n’avait point sa pareille,
Avec effusion chantant la liberté,
Et tout ce qu’aujourd’hui sa voix forte a chanté
Qu’il soit le bienvenu sur nos bords ! Pour lui, certes,
La table et la maison du Mor-Vran sont ouvertes.
A mon feu de goëmon s’il veut s’asseoir un jour,