Page:Brizeux - Œuvres, Les Bretons, Lemerre.djvu/159

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— C’est bien ! dit un vieillard, invité pour son âge
De tout enterrement et de tout mariage.
Çà, prions pour le mort ; ensuite, mes amis,
Pour ceux qui de tout cœur céans nous ont admis.
Tous les ans leur blé croisse et leur grange s’emplisse !
Et l’œuvre de ce jour, le Seigneur la bénisse ! »
Alors les Requiem, les Grâces, les Pater,
Sur l’herbe du courtil furent dits en plein air ;
Puis l’hydromel encor, le cidre après les Grâces,
Pour le coup du départ vinrent remplir les tasses.
Quand, les pieds chancelants, la troupe repartit,
Un long cri du village au vallon retentit.
Leurs femmes les suivaient en devisant entre elles ;
Car, le dos tout courbé sous le poids de leurs pelles,
Ils roulaient lourdement au fond des chemins creux ;
Et, sans voir ses amours, le doux clerc avec eux.

Dés longtemps les deux sœurs, Anne et sa chère Hélène,
Le visage entouré de leurs coiffes de laine.
Avaient quitté la ferme : « Eh quoi ! partir déjà ?
— Oui, la mère attendrait, » leur répondit Anna.
 
Mais nous, pour bien finir cette belle journée.
Par cette mère en deuil montrons-la terminée :
Douce histoire où les cœurs trouvent à se nourrir.
Fleur qui dans nos champs seuls pouvait naître et fleurir…
 
Or la veuve d’Hoel, sombre de corps et d’âme.
S’en allait vers le bourg, alors qu’une autre femme,
Veuve aussi, l’abordant à l’angle d’un chemin,
Lui dit, les yeux en pleurs et la main dans la main :
« Est-ce bien vous, Guenn-Du ? Comme un malheur nous change !