Page:Brizeux - Œuvres, Les Bretons, Lemerre.djvu/210

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Tal-Houarn doit amener lui-même son filleul,
Et dans cette entrevue il ne sera point seul :
Les plus proches parents, enfourchant leur monture,
Du jeune homme amoureux viendront voir la future,
Et, d’un œil curieux visitant la maison,
Diront au fiancé s’il a tort ou raison.
C’est leur droit. Pour Tal-Houarn, son devoir lui commande
Sous un air cordial l’adresse la plus grande.

Du cœur de sa cousine en secret assuré,
Loin d’elle par décence il s’était retiré,
Le brillant fiancé ! mais à quelle poursuite
Léna se trouva-t-elle en butte par sa fuite ?
D’insinuants tailleurs, de graves mendiants
Chaque jour arrivaient au nom des prétendants ;
Mais se présentaient-ils, la poêle retournée
Disait : «Cherchez ailleurs. Adieu, bonne journée ! »
Ou, sans faire semblant, on éteignait les feux :
Les tisons relevés chassent les amoureux.
Pour Ban-Gor, le meunier, envoyé du jeune homme,
Dès qu’il parla, chacun fut d’accord, voici comme :
Au sortir de chez lui, voyant sur un pommier
Une pie à l’œil clair qui semblait l’épier,
Il rentra ; mais bientôt deux blanches tourterelles.
Qui roucoulaient d’amour en polissant leurs ailes,
L’appelèrent. Soudain le prudent messager,
À la main un genêt vert, flexible et léger.
Repartit, méditant le discours sage et tendre
Qu’à la mère et la fille il devait faire entendre.
Maître en plus d’un métier, beau meunier, beau parleur,
Son art savait de tout tirer la fine fleur.
Aussi, dès qu’il parut, les lèvres de sourire,