Page:Brizeux - Œuvres, Les Bretons, Lemerre.djvu/71

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Jeunes gens, approchez ! Arrière la vieillesse !
Arrière ce qui porte et jupe et tablier !
Des hardis jeunes gens je suis le conseiller.
Approchez, mes amis, venez ! pour vos oreilles
Je réserve un concert de choses sans pareilles ;
Mais je le dis tout net aux filles, aux vieillards :
« Arrière les jupons et tous les béquillards ! »
 
Pourtant, jeunes et vieux, sortis du cimetière,
Par delà les talus couvrent la place entière
Le sonneur crie en vain. Dans tout ce brouhaha,
Avant qu’il ait parlé la foule rit déjà.
 
C’était un vrai plaisant.
« Voyez ces filles d’Eve !
Pour savoir mon secret, comme leur front se lève !
Les grands-pères aussi qui se tiennent tout droits !
Eh bien ! faites silence au pied de cette croix,
Je parlerai pour tous. — Or çà, mes belles filles,
Bonshommes qui traînez, en toussant, vos béquilles,
Disposez-vous ! Demain, les habitants de Scaer
(Adroits jouteurs, aux bras de saule, au corps de fer),
Dans un immense pré, nommé Pré-de-la-Source,
Donneront une lutte au bourg, après la course ;
Scaer y doit envoyer ses hommes les plus forts,
Prêts avec tout venant à lutter corps à corps.
Çà donc, qui veut partir ? »
Un rire de surprise
À ces mots fit trembler les vitres de l’église.
Quand ce sonneur parlait sur le pied de la croix,
Il aurait égayé des prêtres et des rois ;
Certaines gens blâmaient pourtant ses fantaisies :