Page:Brizeux - Œuvres, Marie, Lemerre.djvu/155

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Marie


 
Passant avec amour ses doigts dans mes cheveux
Longs alors, et mêlés sans ordre sur mes yeux,
La dame d’un manoir me dit : « Savant poète,
N’aurai-je point mon tour dans quelque chansonnette,
Dans quelque chanson douce, ainsi que par millier
Votre âme bien aimante en compose, écolier,
Pour louer, au milieu de l’encens et des cierges,
Les beaux anges gardiens et la reine des vierges ;
Ou pour chanter tout bas, sous un mur isolé,
Les fillettes du Scorf et celles de l’Ellé ?
Vous rougissez !… Ah ! oui, rougissez ! Chose infâme
De préférer ainsi vilaine à noble dame,
A nos airs gracieux leurs pas pesants et lourds,
Et les coiffes de chanvre aux toquets de velours.
Rougissez !… Vos cheveux filés d’or et de soie,
Et si longs qu’en leurs flots ma main blanche se noie,
Certes n’auraient besoin, avec amour pareil,
D’huile ni de senteurs pour mieux luire au soleil.
Assez, bel écolier, assez pour telles filles
Qu’à votre chaperon passiez blanches coquilles,
Jaunes fleurs de landier, ou bien quelques bluets
Qui viennent sur le cou tomber en chapelets !