Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/297

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tout son cœur et sans arrière-pensée. C’est lui qui a vraiment enseigné le gouvernement représentatif à la nation nouvelle, tandis que M. de Chateaubriand l’enseignait à l’émigration et à la gentilhommerie. Jusque-là, même dans sa partie la plus saine, la nation nouvelle en était encore aux idées de 1791. L’histoire de la constitution préparée par le sénat conservateur en fait foi. On ne saurait trop apprécier sur ce point la dette de notre pays envers Benjamin Constant : ses différentes brochures ont éclairé les plus habiles, illuminé le gros du public et transformé en lieux communs des vérités ignorées ou méconnues ; c’est le premier des triomphes en philosophie et en politique.

Je l’assistais dans ce travail en qualité de manœuvre ; je l’aidais à faire passer, dans le langage technique de notre législation, des idées empruntées à la législation britannique, à ménager les transitions entre l’un et l’autre. Il est telle de ses brochures, entre autres, et ce n’est pas la meilleure, celle sur la responsabilité des ministres et autres agents du pouvoir exécutif dont je lui ai suggéré les données principales ; on trouvera dans mes papiers un essai sur ce sujet ; ç’avait été l’un de mes premiers travaux à mon entrée dans la vie publique.