Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/305

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c’était une dette personnelle, dont l’emploi avait été fait au profit de l’État. Mais cette promesse tombait naturellement avec celui qui l’avait faite. Les bonapartistes, dans l’avant-goût de leur triomphe, pressaient madame de Staël de ne pas s’éloigner, de rester, de se déclarer pour l’empereur, lui promettant alors monts et merveilles. J’ai entendu à ce sujet, M. de la Valette, qui demeurait dans la même maison qu’elle, redoubler d’instances à mesure que le moment fatal approchait, et le prince de Beauvau, le gouverneur du roi de Rome, se faisait fort de tout obtenir.

Madame de Staël recevait ces insinuations avec le dédain qu’elles méritaient, faisait ses paquets à la hâte, en m’exhortant à rester aussi longtemps qu’il y aurait quelque chance de résistance à la nouvelle invasion du despotisme impérial, et en me donnant rendez-vous à Coppet, lorsqu’il n’y en aurait plus.

Je restai. Le gouvernement et la société offraient un spectacle misérable. On se repaissait de fausses nouvelles sans y ajouter la moindre foi. On s’échauffait en déclamations que chacun appréciait à leur juste valeur. On se préparait à la résistance avec la ferme résolution de ne pas attendre le premier