Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/44

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

leur porter des fruits et des rafraîchissements qu’on ne nous défendit point de leur offrir.

Le spectacle était douloureux, l’indignation grande, mais la consternation plus grande encore. Chacun voyait recommencer le règne de la Terreur, et s’y préparait avec résignation.

Nous étions bien avec la famille de M. de Menou, frère du général Menou, connu par la vivacité de ses opinions à l’Assemblée constituante, et par le rôle qu’il a joué depuis, soit dans la guerre de la Vendée, soit au 13 vendémiaire, soit enfin dans l’expédition d’Égypte. Cette famille bonne, aimable, et dont le fils aîné a, plus tard, épousé l’une de mes sœurs, se disposait comme nous à l’exil. Entre le château de Boussay qu’elle habitait et les Ormes, les communications étaient continuelles ; personne n’osait se flatter d’échapper à la proscription, personne ne savait où précisément chercher asile, ni comment réaliser les débris d’une fortune à peine recouvrée.

Les plus effrayés, c’étaient les membres du clergé, et c’était à juste titre. Je venais d’achever mon instruction religieuse, et de faire ma première communion. Mon instruction avait été confiée à un curé du voisinage, le culte n’étant point encore