Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/56

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servé les leçons qu’il nous dictait, et, bien que depuis cette époque, la science soit devenue plus savante, et moi-mêmeplus ignorant, je les parcours encore quelquefois avec plaisir.

La même liberté régnait à l’École des mines, où les élèves sortis de l’École polytechnique devaient être, rigoureusement parlant, les seuls élèves. Entrait aussi qui voulait aux cours ; et chacun en profitait selon son intelligence et son assiduité.

Les professeurs étaient, non seulement des hommes du premier mérite, mais des hommes d’une rare bonté et d’une complaisance inépuisable. M. Haüy surtout était l’un des savants les plus aimables que j’aie rencontrés durant le cours de ma longue carrière. Sa voix était faible mais claire et flexible ; son enseignement était d’une lucidité merveilleuse ; il se laissait interrompre volontiers, non seulement par les élèves, mais par les simples assistants. Que de fois, après la leçon, n’ayant pas bien compris l’ordre et l’enchaînement de ses idées, je me suis approché de lui pour lui adresser une ou deux questions, et je l’ai vu recommencer pour moi seul la leçon tout entière ! Souvent il m’invitait à venir le trouver, avant la leçon, dans son humble cabinet, dont tout l’ameublement se composait de