Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/87

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l’empereur sortir de son cabinet pour aller dîner ; il passa devant moi, me dit quelques mots d’un ton bourru, et s’éloigna.

Ce fut là toute mon entrevue. Je retournai à Vienne, moitié fâché, moitié content ; fâché de n’avoir point été appelé, et content de n’avoir pas été mis peut-être à trop rude épreuve.

Je restai trois semaines à Vienne, attendant ce qu’on ferait de moi. Les auditeurs en expectative étaient logés à la chancellerie d’État, bâtiment attenant au palais impérial, le même où, depuis, j’ai vu résider le prince de Metternich. L’établissement était vide, et complètement démeublé ; chacun de nous avait, pour sa part, une petite chambre, avec un méchant lit, deux chaises de paille et une table en bois de sapin. M. de Bassano et M. Daru, intendant général de l’armée tenaient table ouverte pour nous.

Je trouvai, en très grand nombre, à Vienne, des généraux, des officiers, que j’avais connus à Paris. Tous, et je dois ajouter même les maréchaux, même les grands personnages que je voyais chez M. de Bassano, souhaitaient la paix avec ardeur, sans trop oser l’espérer, maudissant tout bas leur maître, et, comparant l’armée qu’ils voyaient