Page:Broglie - Souvenirs, 1830-1832.djvu/16

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ment assaisonnée, et moins encore pour ces appétits de représailles dont toute émigration a peine à se défendre. Je ne me suis pas tenu à moindre distance, malgré mes liaisons politiques et domestiques, de tous les complots républicains ou bonapartistes, n’étant ni l’un ni l’autre de cœur ni d’opinion. Duc et pair par droit de naissance, c’était le langage de ce temps-là, ni Louis XVIII, ni Charles X, ni le dauphin, ni la dauphine ne connaissaient mon visage, et ne m’ont jamais adressé la parole. Je n’ai jamais été présenté à madame la duchesse de Berry, je n’ai vu le duc de Bordeaux qu’exilé en 1840, et contemplant comme moi dans l’église de Saint-Pierre le monument élevé au dernier des Stuarts.

Nul n’était donc plus libre que moi de tout engagement aux approches de la révolution de Juillet, et, pour rendre ma confession complète, j’ajouterai qu’en suivant de l’œil le cours précipité des événements, je ne me livrais pas aussi volontiers que bien d’autres à la perspective qui semblait s’ouvrir. La nécessité de traverser un état de transition révolutionnaire, et l’incertitude du résultat définitif m’inspiraient plus de répugnance et d’anxiété que n’avait, pour moi, d’attrait l’espérance d’un état