Page:Brontë - Le Professeur.djvu/278

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

qui est pressée d’en finir avec une affaire redoutable. Je la fis monter dans la voiture, où M. Vandenhuten la reçut avec bonté ; nous arrivâmes à la chapelle protestante, d’où nous sortîmes mariés au bout de quelques instants.

Protégés contre les regards indiscrets par notre isolement et notre obscurité, il devenait inutile de nous absenter de Bruxelles, et nous allâmes tout de suite prendre possession d’une maisonnette que j’avais louée dans le faubourg le plus voisin du quartier où se trouvaient nos occupations.

Trois ou quatre heures après la cérémonie du mariage, Frances, vêtue d’une jolie robe lilas, plus chaude que la mousseline nuptiale, ayant devant elle un piquant tablier de soie noire, et au cou un joli ruban de la couleur de sa robe, était agenouillée sur le tapis d’un petit salon convenablement meublé, et rangeait sur les planches d’une étagère les livres que je prenais sur la table, et que je lui donnais un à un. Le temps avait changé tout à coup, il faisait froid et sombre au dehors ; le ciel couvert de nuages paraissait plein de tempêtes ; les piétons enfonçaient jusqu’à la cheville dans la neige qui tombait à gros flocons, et dont le pavé des rues était déjà couvert. À l’intérieur, tout brillait autour de nous ; la flamme de notre foyer pétillait joyeusement. Notre nouvelle habitation était d’une excessive fraîcheur ; meublée déjà depuis quelques jours, il ne restait plus à mettre à leur place que les livres et quelques menus objets de cristal ou de porcelaine. Frances y fut occupée jusqu’au soir ; je lui appris alors à faire une tasse de thé à la manière anglaise, et quand elle eut surmonté l’effroi que lui causait la vue de cette masse énorme de matériaux que je mettais dans la théière, elle me servit un véritable repas anglais auquel ne manquaient, je vous assure, ni bougie, ni bon feu, ni confort d’aucune