Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/161

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qui, pour plus de sûreté, la jeta en plein milieu du feu ; sur quoi Mr Edgar fut saisi d’un tremblement nerveux et devint mortellement pâle. Pour rien au monde il n’aurait pu dominer cet excès d’émotion ; l’angoisse et l’humiliation réunies l’accablaient complètement. Il s’appuya sur le dossier d’une chaise et se couvrit le visage.

— Oh ! ciel ! dans les anciens temps, voilà qui vous eût valu les éperons de chevalier ! s’écria Mrs Linton. Nous sommes vaincus ! nous sommes vaincus ! Heathcliff ne lèverait pas plus un doigt contre vous que le roi ne mettrait son armée en marche contre une bande de souris. Courage ! on ne vous fera pas de mal ! Vous n’êtes pas un agneau, mais un levraut à la mamelle.

— Je vous souhaite bien du plaisir avec ce lâche qui a du lait dans les veines, Cathy, dit son ami. Je vous fais compliment de votre goût. Et voilà l’être bavant et frissonnant que vous m’avez préféré ! Je ne voudrais pas le frapper avec mon poing, mais j’éprouverais une satisfaction considérable à le frapper avec mon pied. Pleure-t-il, ou va-t-il s’évanouir de peur ?

Il s’approcha et secoua la chaise sur laquelle Linton s’appuyait. Il eût mieux fait de rester à distance : mon maître bondit soudainement et lui porta à la gorge un coup qui aurait renversé un homme plus frêle ; il en eut la respiration coupée pendant une minute. Tandis qu’il suffoquait, Mr Linton sortit dans la cour par la porte de derrière et, de là, revint vers la porte de la façade.

— Voilà ! vos visites ici sont terminées, s’écria Catherine. Partez, maintenant ; il va revenir avec une paire de pistolets et une demi-douzaine d’hommes de renfort. S’il a entendu notre conversation, il ne vous pardonnera certainement jamais. Vous m’avez joué un