Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/160

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et je vous avertis maintenant que j’exige votre départ immédiat. Trois minutes de retard rendraient ce départ involontaire et ignominieux.

Heathcliff toisa la taille et la carrure de son interlocuteur d’un œil plein de dérision.

— Cathy, votre agneau que voilà menace comme un taureau, dit-il. Il court risque de se fendre le crâne contre mes poings. Pardieu ! Mr Linton, je suis au désespoir que vous ne valiez même pas qu’on vous envoie rouler à terre !

Mon maître jeta un regard vers le corridor et me fit signe d’aller chercher les hommes ; il n’avait pas l’intention de se risquer à une rencontre personnelle. J’obéis à son indication ; mais Mrs Linton, soupçonnant quelque chose, me suivit. Quand j’essayai d’appeler les hommes, elle me repoussa, ferma violemment la porte et tourna la clef.

— Jolis procédés ! dit-elle en réponse au regard de surprise courroucée de son mari. Si vous n’avez pas le courage de l’attaquer, faites-lui vos excuses, ou reconnaissez-vous battu. Cela vous corrigera de l’envie de feindre plus de bravoure que vous n’en avez… Non, j’avalerai la clef avant que vous l’attrapiez. Je suis admirablement récompensée de ma bonté pour vous deux. Après une constante indulgence pour la faible nature de l’un et la mauvaise nature de l’autre, je reçois comme remerciements deux témoignages d’ingratitude aveugle, stupide jusqu’à l’absurdité ! Edgar, j’étais en train de vous défendre, vous et les vôtres ; et je voudrais que Heathcliff vous rouât de coups, à vous en rendre malade, pour avoir osé mal penser de moi !

Les coups ne furent pas nécessaires pour produire cet effet sur le maître. Il essaya d’arracher la clef à Catherine,