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Toutes les reliques des morts sont précieuses, quand on faisait cas d’eux de leur vivant.


Chère Hélène,

Je suis arrivée hier soir à Hurle-Vent et j’y ai appris pour la première fois que Catherine avait été et est encore très malade. Je suppose que je ne dois pas lui écrire, et mon frère est trop fâché ou trop désolé pour répondre au billet que je lui ai envoyé. Pourtant, il faut que j’écrive à quelqu’un et je n’ai pas d’autre choix que de m’adresser à vous.

Dites à Edgar que je donnerais tout au monde pour le revoir, que mon cœur est revenu à Thrushcross Grange vingt-quatre heures après que j’en fus partie, et qu’il y est en ce moment, plein de tendresse pour lui et pour Catherine. Je ne peux cependant l’y suivre (ces mots sont soulignés) ; qu’ils ne m’attendent pas et qu’ils tirent de ma conduite les conclusions qu’ils voudront, pourvu toutefois qu’ils ne mettent rien au compte d’une faiblesse de volonté ou d’un manque d’affection.

Le reste de cette lettre est pour vous seule. J’ai deux questions à vous faire. La première est celle-ci : comment êtes-vous arrivée à conserver la sociabilité qui est dans la nature humaine quand vous demeuriez ici ? Je ne puis découvrir en moi aucun sentiment commun avec les êtres qui m’entourent.

La deuxième question m’intéresse particulièrement. La voici : Mr Heathcliff est-il un homme ? Si oui, est-il fou ? Si non, est-ce un démon ? Je ne vous dirai pas les raisons que j’ai de faire cette demande. Mais je vous supplie de m’expliquer si vous le pouvez, quel être j’ai épousé, quand vous viendrez me voir, et il faut que