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Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/224

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voisin. Comme je m’avançais vivement pour voir si elle était évanouie, il poussa un grognement, écuma comme un chien enragé et l’attira à lui avec une jalousie vorace. J’avais l’impression de n’être plus en compagnie d’une créature de la même espèce que moi ; il avait l’air de ne pas comprendre quand je lui parlais. Aussi me tins-je à l’écart et gardai-je le silence, en proie à une grande perplexité.

Un mouvement que fit Catherine me rassura un peu. Elle leva la main pour enlacer le cou de Heathcliff, qui la tenait toujours, et rapprocher sa joue de la sienne. Lui, de son côté, la couvrant de caresses frénétiques, disait avec rage :

— Vous m’apprenez maintenant combien vous avez été cruelle… cruelle et fausse. Pourquoi m’avez-vous méprisé ? Pourquoi avez-vous trahi votre cœur, Catherine ? Je ne puis vous adresser un mot de consolation. Vous avez mérité votre sort. Vous vous êtes tuée vous-même. Oui, vous pouvez m’embrasser, pleurer, m’arracher des baiser et des pleurs : ils vous dessécheront, ils vous damneront. Vous m’aimiez… quel droit aviez-vous alors de me sacrifier — quel droit, répondez-moi — au pauvre caprice que vous avez ressenti pour Linton ? Alors que ni la misère, ni la dégradation, ni la mort, ni rien de ce que Dieu ou Satan pourrait nous infliger ne nous eût séparés, vous, de votre plein gré, vous l’avez fait. Je ne vous ai pas brisé le cœur, c’est vous-même qui l’avez brisé ; et en le brisant vous avez brisé le mien. Et c’est tant pis pour moi si je suis fort. Ai-je besoin de vivre ? Quelle existence sera la mienne quand… Oh ! Dieu ! Auriez-vous envie de vivre avec votre âme dans la tombe ?

— Laissez-moi ! laissez-moi ! sanglotait Catherine. Si j’ai mal fait, j’en meurs. Cela suffit ! Vous aussi, vous