Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/31

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aurait rossés comme y faut… mais y n’est pus là !

« S’arrachant à son paradis au coin du feu, Hindley a saisi l’un de nous au collet, l’autre par le bras, et nous a jetés tous deux dans la cuisine où, assurait Joseph, « le vieux Nick[1] » viendrait nous prendre, aussi sûr que nous étions vivants ; ainsi réconfortés, nous avons cherché chacun de notre côté un coin pour attendre son arrivée. J’ai attrapé ce livre-ci, et une bouteille d’encre sur le rayon, j’ai entr’ouvert la porte donnant sur l’extérieur pour avoir un peu de lumière, et j’ai passé vingt minutes à écrire. Mais mon compagnon est impatient ! il propose de nous approprier le manteau de la laitière et de nous abriter dessous pour filer dans la lande. Bonne idée… et puis, si le vieux grognon arrive, il pourra croire que sa prophétie est réalisée… Nous ne pourrons pas être plus à l’humidité ni avoir plus froid sous la pluie qu’ici. »

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Je suppose que Catherine mit son projet à exécution, car dans la phrase suivante elle abordait un autre sujet ; elle prenait le ton plaintif.

« Comme je me doutais peu que Hindley me ferait jamais tant pleurer ! écrivait-elle. J’ai mal à la tête, au point de ne pouvoir la garder sur l’oreiller, et pourtant je ne peux pas céder. Pauvre Heathcliff ! Hindley le traite de vagabond et ne veut plus qu’il reste ni qu’il mange avec nous ; il prétend que lui et moi ne devons plus jouer ensemble et menace de le chasser de la maison si nous enfreignons ses ordres. Il a blâmé notre père (comment a-t-il osé ?) pour avoir traité H. avec trop de bienveillance, et il jure qu’il le remettra à sa vraie place. »

  1. Le diable. (Note du traducteur.)