Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/32

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Je commençais à somnoler et à laisser tomber le nez sur la page à moitié effacée. Mon œil passa du manuscrit à l’imprimé. Je vis un titre rouge ornementé « Septante fois sept[1]et le Premier de la septante et unième[2]. Pieux discours prononcé par le Révérend Jabes Branderham, dans la chapelle de Gimmerton Sough » Pendant que, dans une demi-inconscience, je me creusais la cervelle pour deviner ce que Jabes Branderham avait pu tirer de son sujet, je retombai allongé dans mon lit et m’endormis. Hélas ! tristes effets du mauvais thé et de la mauvaise humeur ! Quelles autres causes auraient pu me faire passer une si terrible nuit ? Je n’ai souvenir d’aucune qui lui soit comparable depuis que j’ai le sentiment de la souffrance.

Je commençai à rêver presque avant d’avoir cessé de me rendre compte de l’endroit où je me trouvais. Il me semblait que c’était le matin ; je m’étais mis en route pour rentrer chez moi, avec Joseph comme guide. Une épaisseur de plusieurs mètres de neige couvrait notre chemin. Comme nous avancions péniblement, mon compagnon m’accablait d’incessants reproches parce que je n’avais pas pris un bâton de pèlerin ; il m’assurait que je ne pourrais jamais pénétrer dans la maison sans en avoir un, et brandissait fièrement un

  1. Saint Matthieu, XVII, 21, 22 : « Alors Pierre, s’approchant de lui, dit : Seigneur, toutes les fois que mon frère péchera contre moi, lui pardonnerai-je ? jusqu’à sept fois ? Jésus lui dit : Je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à septante fois sept fois. » (Note du traducteur.)
  2. C’est-à-dire : le premier péché de la septante et unième série de sept, soit le quatre cent quatre-vingt-onzième péché, celui qui viendrait après les quatre cent quatre-vingt-dix péchés qu’un chrétien doit pardonner. (Note du traducteur.)