Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/388

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— Et vous pourriez vous procurer la clef si vous vouliez ?

— Oui, quand je suis en haut ; mais je ne peux pas monter maintenant.

— Dans quelle pièce est cette clef ?

— Oh ! s’écria-t-il, je ne vous dirai pas où elle est ! C’est notre secret. Personne, ni Hareton, ni Zillah, ne doit le savoir. Allons ! vous m’avez fatigué… allez vous-en ! allez vous-en !

Il appuya son visage sur son bras et referma les yeux.

Je jugeai qu’il valait mieux m’en aller sans voir Mr Heathcliff et ramener de la Grange des renforts pour délivrer Catherine. En me voyant arriver, grands furent l’étonnement et aussi la joie des autres serviteurs. Quand ils surent que leur jeune maîtresse était sauve, deux ou trois d’entre eux se préparaient à courir pour crier la nouvelle à la porte de Mr Edgar ; mais je voulus la lui annoncer moi-même. Comme il avait changé en si peu de jours ! Il était couché, vraie image de la tristesse et de la résignation, attendant la mort. Il paraissait très jeune ; quoiqu’il eût en réalité trente-neuf ans, on lui en aurait facilement donné dix de moins. Il pensait à Catherine, car il murmurait son nom. Je lui pris la main et parlai.

— Catherine va venir, mon bon maître, dis-je doucement. Elle est en vie et bien portante ; elle sera là, j’espère, ce soir.

Je tremblai aux premiers effets de ces simples mots. Il se souleva à demi, jeta autour de la chambre un regard avide, puis retomba évanoui. Dès qu’il eut repris connaissance, je racontai notre visite forcée et notre détention à Hurle-Vent. Je dis que Heathcliff m’avait obligée d’entrer, ce qui n’était pas tout à fait vrai. Je chargeai Linton le moins possible ; je ne dépeignis pas non