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Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/438

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tout ce bel ouvrage sur sa simple demande.

— J’avais oublié que les cassis étaient à Joseph, répondit Earnshaw assez penaud ; mais je lui dirai que c’est moi qui ai tout fait.

Nous prenions toujours nos repas avec Mr Heathcliff. Je remplissais les fonctions de maîtresse de maison pour préparer le thé et pour découper. J’étais donc indispensable à table. Catherine était en général à côté de moi ; mais, ce jour-là, elle m’avait fui pour se rapprocher de Hareton. Je vis bientôt qu’elle ne mettrait pas plus de discrétion dans son amitié qu’elle n’en avait mis dans son hostilité.

— Allons, faites attention à ne pas trop parler à votre cousin et à ne pas trop vous occuper de lui : telles furent les instructions que je lui soufflai à l’oreille quand nous entrâmes dans la pièce. Cela contrarierait certainement Mr Heathcliff, et il serait furieux contre vous deux.

— Je n’en ai pas l’intention, répondit-elle.

Une minute après, elle était à côté de lui et piquait des primevères dans son assiette de porridge.

Il n’osait pas lui adresser la parole en cet endroit ; à peine osait-il lever les yeux. Cependant, elle continuait de le taquiner, et deux fois il fut sur le point de ne pouvoir retenir son rire. Je fronçai les sourcils, et elle jeta un regard sur le maître ; mais l’esprit de celui-ci était absorbé par d’autres sujets que la tenue de ses convives, comme on en pouvait juger à son attitude. Catherine devint un instant sérieuse et le considéra avec une profonde gravité. Ensuite elle se tourna et recommença ses folies. Hareton finit par laisser échapper un rire étouffé. Mr Heathcliff tressaillit : ses yeux nous dévisagèrent rapidement. Catherine soutint son examen