Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/442

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reproche. Je ne veux pas vous entendre lui parler ainsi. Finissez.

— Mais vous ne le laisserez pas me battre ?

— Venez, alors, lui dit-il avec fermeté.

Il était trop tard : Heathcliff l’avait saisie.

— Maintenant, va-t’en, toi, dit-il à Earnshaw. Maudite sorcière ! Cette fois-ci elle m’a provoqué à un moment où je ne pouvais le supporter ; elle s’en repentira jusqu’à la fin de ses jours.

Il tenait ses cheveux dans sa main. Hareton essaya de les dégager, le suppliant de l’épargner pour cette fois. Les yeux noirs de Heathcliff étincelaient ; il semblait prêt à mettre Catherine en pièces, et j’allais me risquer à venir à son secours, quand tout à coup ses doigts se relâchèrent ; il abandonna sa tête pour la prendre par le bras, et la regarda fixement. Puis il lui mit la main sur les yeux, resta un moment immobile comme s’il cherchait à retrouver ses esprits et, se tournant de nouveau vers Catherine, dit avec un calme affecté :

— Il faut que vous appreniez à éviter de me mettre en colère, ou je finirai vraiment par vous tuer, un jour ! Allez avec Mrs Dean et restez avec elle ; gardez pour elle vos insolences. Quant à Hareton Earnshaw, si je le vois vous écouter, je l’enverrai chercher son pain là où il pourra le trouver. Votre amour fera de lui un proscrit et un mendiant. Nelly, emmenez-la ; et laissez-moi tous. Laissez-moi !

Je fis sortir ma jeune dame : elle était trop heureuse de s’en être tirée à si bon compte pour résister. L’autre suivit, et Mr Heathcliff resta seul dans la salle jusqu’au dîner. J’avais conseillé à Catherine de dîner en haut ; mais, dès qu’il s’aperçut que sa chaise restait vide, il m’envoya la chercher. Il ne nous adressa pas la parole, mangea