Page:Brontë - Un amant.djvu/16

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well prendre la direction du ménage ; sa venue d’ailleurs, ne modifia guère la manière de vivre des enfants, d’Emily surtout, que miss Branwell ne put jamais se résoudre à aimer.

Jamais enfants ne furent à ce point privés de tous les avantages de l’enfance ; jamais il n’eut d’enfants qui eussent été si peu enfants. À cinq ans, Emily, à qui son père demandait, par manière d’exercice intellectuel, comment il convenait de traiter Branwell s’il était trop bruyant, répondit qu’il fallait « d’abord raisonner avec lui, puis, au cas où il refuserait d’entendre, le fouetter ». À six ans, elle écrivait des contes fantastiques, pleins déjà d’imaginations sombres.

Et les journées se passaient, monotones, muettes, lugubres. Les petites filles se levaient à cinq heures, balayaient, surveillaient le déjeuner, prenaient une leçon d’anglais avec leur père et une leçon de couture avec leur tante ; le reste du temps, c’était la promenade sur la bruyère, la lente promenade toujours recommencée. Les six enfants marchaient côte à côte, tantôt commentant les dernières nouvelles des affaires d’Orient, tantôt se racontant à tour de rôle de terribles histoires, sous le vent qui soufflait.

En septembre 1824, Emily et Charlotte furent mises en pension à Cowan-Bridge, dans une école où étaient déjà leurs deux sœurs ainées. C’était une de ces écoles-géhennes comme on peut en voir dans les romans de Dickens, à moins que l’on ne prenne la peine d’explorer soi-même les petites villes de France ou d’Angle-