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Page:Bronte - Shirley et Agnes Grey.djvu/647

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comme un coupable convaincu en lui-même de la justice de l’arrêt qui le condamne.

Ainsi j’étais renvoyée, et j’allais revoir la maison paternelle. Hélas ! qu’allaient-ils penser de moi ? Incapable, après toutes mes vanteries, de tenir même pendant une année la place de gouvernante auprès de trois jeunes enfants, dont la mère, au dire de ma tante, était une femme très-bien ; ayant été ainsi mise dans la balance et trouvée trop légère, pouvais-je espérer qu’ils me laisseraient faire un second essai ? Cette pensée m’était fort pénible : car, si vexée, fatiguée et désappointée que je fusse, et quoique j’eusse appris chèrement à aimer et apprécier la maison paternelle, je n’étais point encore dégoûtée des aventures ni disposée à me relâcher de mes efforts. Je savais que tous les parents ne ressemblaient point à M. et à Mme Bloomfield, et j’étais assurée que tous les enfants n’étaient point comme les leurs. La famille dans laquelle j’entrerais serait différente, et un changement, quel qu’il fût, ne pouvait qu’être avantageux. J’avais été éprouvée par l’adversité, instruite par l’expérience, et je brûlais de relever mon honneur aux yeux de ceux dont l’opinion pour moi était plus que tout au monde.




CHAPITRE VI.

Encore le presbytère.


Pendant quelques mois je demeurai paisible à la maison paternelle, jouissant de la liberté, du repos et d’une véritable amitié, toutes choses dont j’avais été sevrée si longtemps. Je me remis à l’étude pour recouvrer ce que j’avais perdu pendant mon séjour à Wellwood-House, et afin de faire une nouvelle provision d’instruction pour un usage prochain. La santé de mon père était encore bien mauvaise, mais non matériellement pire que la dernière fois que je l’avais vu, et j’étais heureuse de pouvoir le réjouir par mon retour et le distraire en lui chantant ses airs favoris.

Nul ne triompha de mon échec, ou ne me dit que j’aurais mieux fait de suivre son avis et de rester à la maison. Tous fu-