Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/120

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
98
LE CORRECTEUR TYPOGRAPHE

papier, ou encore des ors brillants frappés dans les cuirs fauves, et aussi des chromos plutôt moins artistiques qui cachent aux yeux hypnotisés du lecteur la médiocrité du contenu.

Pour être réellement parfait, un livre doit réunir, aussi bien dans le fonds que dans la forme, les qualités qui résultent de toutes les difficultés surmontées, au cours de sa confection, dans la composition, dans la correction, dans l’impression, dans le choix du papier, dans la reliure, etc.

Les qualités littéraires d’un ouvrage sont au-dessus des considérations exposées ici : elles se déduisent d’autres lois ; elles sont du ressort propre de l’écrivain, en dehors du domaine de l’imprimeur. Toutefois, à ces qualités qui parmi beaucoup d’autres doivent tenir la première place, l’imprimeur est tenu d’apporter un appoint ; le soin qu’il prend de parfaire ce dernier, dans les limites qui lui sont imparties, est le vernis superficiel qui donne au travail toute sa valeur et en fait, au point de vue du texte, une œuvre irréprochable.

La correction — cet appoint qui donne au texte le « vernis superficiel » — est ainsi l’une des qualités techniques les plus importantes à exiger d’un livre.

Tel était autrefois le sentiment de nos illustres prédécesseurs dans la typographie, sentiment que Crapelet résumait si heureusement dans une phrase célèbre : « La correction, la plus belle parure des livres. »

Telle était aussi l’opinion de M. Bernier, président de la Société des Correcteurs parisiens, lorsqu’il écrivait, en juillet-août 1867, dans le journal l’Imprimerie : « Quand le véritable amateur, quand le bibliophile consciencieux, quand cette partie même du public qu’on est convenu d’appeler le public éclairé, achète un livre, quelle est sa plus grande, son unique préoccupation, devrais-je dire ? Le savant et le lettré s’occupent-ils donc tant de la teinte plus ou moins foncée de l’encre, de l’uniformité plus ou moins réelle du tirage ? Tiennent-ils donc si grand compte de la couleur, de l’épaisseur, de la fermeté du papier ? Non : ce qu’ils veulent, ce qu’ils recherchent, ce qu’ils trouvent, hélas ! trop rarement, par ce temps de marasme de la correction, c’est un livre bien fait, composé avec goût et méthode, selon les règles de l’art, et surtout exempt de ces fautes de toute nature qui pullulent même — qui pullulent surtout — dans les livres sortis de nos impri-