Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/31

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
PROTE ET CORRECTEUR
9

dicteurs d’ignorance ; selon eux, prote a été confondu avec correcteur. »

Certains de ces « Messieurs » estimeront certes que, si par erreur ils ont confondu le prote avec le correcteur, ils n’ont pas été perplexes au sujet de son instruction : l’opinion qu’on leur reproche leur faisant une obligation d’accorder au moins au prote l’instruction qu’on ne saurait dénier au correcteur. Mais Littré, on peut le croire, n’a jamais eu cette pensée de « confondre le prote avec le correcteur » : il nous paraît tout simplement avoir fait remarquer que, s’abusant sur le sens réel des mots, certains auteurs donnaient parfois à « ceux qui lisent ou corrigent les épreuves » le nom de prote. Pour notre compte personnel, nous pensons, tout au contraire de Ch. Ifan, que le public, qui confond souvent le correcteur avec le prote, en imputant au second les attributions du premier, ne commet que fort rarement — jamais, pourrait-on dire, en osant quelque peu — cette méprise de transporter les fonctions du prote au correcteur :

« Le prote est le représentant immédiat du maître imprimeur : il dirige et administre l’établissement, reçoit les auteurs et traite avec eux, embauche et débauche le personnel attaché à l’imprimerie, distribue la besogne, etc.

« Le correcteur n’a pas à s’immiscer dans l’administration industrielle : il est le représentant de la science et de la littérature dans l’imprimerie. Son département est du domaine de l’intelligence pure. Il n’est placé sous la direction du prote que comme faisant partie de l’usine typographique. Dans l’exercice propre de ses fonctions, il est seul juge ou, tout au moins, le juge le plus compétent des concessions à faire aux écrivains sous le rapport de ce que l’on appelle, en terme d’imprimerie, la marche à suivre pour chaque ouvrage[1]… » ; « il est l’homme de l’art, connaissant parfaitement et sa langue et l’imprimerie, capable d’amener un ouvrage à ce degré de perfection tangible qui doit être l’objet de sa préoccupation la plus ardente[2]. »

« S’il appartient à l’auteur de confectionner son texte, d’agencer ses phrases, de les ponctuer[3] », en un mot d’écrire son livre, il est du

  1. D’après Bernier et le Grand Dictionnaire universel du xixe siècle de P. Larousse, t. V, p. 181 (1869).
  2. Daupeley-Gouverneur, le Compositeur et le Correcteur typographes, p. 213.
  3. Id., Ibid., p. 216.