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LE CORRECTEUR TYPOGRAPHE

breuses déparent le texte, et des corrections à la plume rétablissent le sens de la phrase. Erhard avait-il, à cette date, abandonné, lui aussi, ses compatriotes ; et ceux-ci, laissés à leurs propres ressources, s’étaient-ils, au point de vue littéraire, trouvés inférieurs à leur tâche ?

Bientôt Friburger et ses compagnons quittent la Sorbonne et transportent leurs presses, non loin de celles de leurs anciens ouvriers devenus leurs concurrents, rue Saint-Jacques, à l’enseigne du Soleil d’Or. La date exacte de ce transfert n’est point connue[1], mais une Bible — la première édition de ce travail imprimée en France — datée de 1475, porte à l’achevé d’imprimer ces vers latins :

Jam tribus undecimus lustris Francos Ludovicus
Rexerat, Utricus, Martinus itemque Michael,
Orti Teutonia, hanc mihi composuere figuram
Parisiis arte sua. Me correctam vigilanter
Venalem in vico Jacobi Sol aureus offert.


« Ulrich, Martin et Michel, originaires d’Allemagne, par leur art m’ont mise en cette figure, à Paris, après une vigilante correction. Le Soleil d’Or en la rue Saint-Jacques m’offre en vente. » Vigilanter correctam ! Les artisans du Soleil d’Or ont-ils compris qu’ils devaient faire oublier les erreurs et les défauts de leurs dernières éditions de la Sorbonne ? La chose est possible. Mais d’autres raisons pouvaient également inciter les prototypographes parisiens à donner plus de soins à leurs impressions. Une concurrence très vive existait entre les deux ateliers de la rue Saint-Jacques. À peine le Soleil d’Or avait-il fait paraître un ouvrage qu’aussitôt le Chevalier au Cygne le reproduisait, encore expurgé et amélioré.

En 1484, de la rue Saint-Jacques, Gering transporte l’atelier du Soleil d’Or rue de la Sorbonne, où Higman[2] travaille jusqu’en 1489. Les correcteurs de cet atelier furent Gilles de Delft, docteur de Sorbonne, et Pierre Le Secourable (Succurribilis), originaire, de Saint-Lô, docteur régent à Paris en la Faculté de Théologie, grand archidiacre de Rouen, régent au collège d’Harcourt de 1486 à 1509.

En 1477, des ouvriers français ouvrent enfin, à Paris, un atelier

  1. M. Claudin indique pour l’imprimerie de la Sorbonne les dates extrêmes 1470-1472 ; pour l’atelier du Soleil d’Or de la rue Saint-Jacques, 1473-1483.
  2. Sur Higman, voir page 42.