Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/63

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
LES CORRECTEURS A PARIS
41

« coopératif[1] » d’imprimerie : situé également rue Saint-Jacques, près du couvent des Jacobins, il était à l’enseigne du Soufflet-Vert. Un professeur éminent du Collège de Navarre, Guillaume Tardif, prit en mains la direction littéraire de l’atelier et, à l’exemple des Sorbonnistes Jean de La Pierre et Guillaume Fichet, remplit les fonctions de correcteur.

À l’occasion de l’apparition de la Grammaire de Guillaume Tardif, Louis de Rochechouart, évêque de Saintes, dans un quatrain adressé à l’auteur, donne au public ce conseil qui ne pouvait manquer de plaire aux imprimeurs et au correcteur : « On les [les livres] vend peu de chose, et il n’y manque ni un point ni une lettre. Tardif en a revu exactement le texte. Prends et lis[2] ! »

Ce Guillaume Tardif, né au Puy, vers 1440, fut l’auteur d’une Rhétorique, imitée de Cicéron et de Quintilien, et d’un Art de la fauconnerie, ainsi que le traducteur de plusieurs ouvrages latins. Il devint, en 1483, lecteur du roi Charles VIII. Ce fut, sans doute, à lui qu’échut la lourde tâche de mettre au point le texte des livres d’heures commandés par son royal maître, à Antoine Vérard. On sait que Vérard, qui exerça à Paris de 1485 à 1513, eut, le premier, l’idée de faire des livres de prières imprimés, avec sujets et bordures illustrées, enluminés à l’exemple des miniatures des manuscrits.

André Bocard, ou Boucard, originaire du Poitou, fut libraire et imprimeur à Paris de 1491 à 1500. Parmi les ouvrages sortis de ses presses, on mentionne les Lettres et Opuscules de Robert Gaguin[3], terminés le 22 novembre 1498 pour le compte de Durand Gerlier. Déjà, à cette époque, où la concurrence entre maîtres imprimeurs se fait sentir — la rivalité du Soleil d’Or et du Chevalier au Cygne le prouve suffisamment — la réclame ne perd point ses droits et ne néglige aucune occasion de s’exercer. Ainsi Bocard peut « se qualifier de typo-

  1. D’après A. Claudin : « Gaspar et Russangis, Louis Simonel ou Simonet de Bourges, Richard Blandin d’Évreux, Jean Simon et autres. »
  2. Venduntur parvo, nec punctum nec littera deficit.
    Vera recognovit Tardivus. Ecce, lege !

    Voir Claudin, ibid., t. I, p. 153.
  3. Celui-là même auquel, le 1er janvier 1471, G. Fichet écrivait la lettre fameuse dans laquelle on rencontre ce passage : « Les ouvriers typographes racontent ici à qui veut les entendre que c’est un nommé Jean dit Gutenberg qui le premier a inventé aux environs de Mayence l’art de l’imprimerie… »