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endroits qui forment des passes très étroites où le courant est très violent. Le 25 mai 1898, à un point rapide, j’ai mesuré un courant de 11 kilomètres à l’heure, et il n’y avait que un mètre de crue. Aussi faut-il des vapeurs donnant 12 à 14 nœuds de vitesse pour passer les rapides de l’Oubangui. Les rapides avaient été reconnus en 1888 par M. Dunod avec le Djoue, qui n’avait pu franchir les passes de Bangui.

Tous les vapeurs belges sont passés à la cordelle pendant que les nôtres, l’Alima, le Ballay, le Faidherbe, le Jacques d’Uzès, ont passé à la vapeur, quelquefois, il est vrai, en calant les soupapes.

À 60 kilomètres en amont de Bangui, se trouve le dernier rapide, le plus mauvais, celui de l’Éléphant. Les chavirages y sont fréquents, plusieurs blancs s’y sont noyés : dans l’un, le chef de station Juchereau, en décembre 1895. Aussi donne-t-on l’ordre de décharger tous les convois, et les marchandises sont portées pendant 500 à 600 mètres.

Il est difficile de donner exactement l’altitude maxima du massif montagneux de Bangui. On peut l’évaluer à 650 mètres. Si l’on admet avec M. Wauters que la mer intérieure du Congo s’est écoulée autrefois par un col de 425 à 470 mètres, il y a lieu de supposer que cette mer s’étendait jusqu’à Bangui, qui est à 350 mètres d’altitude. Les montagnes de Bangui dominaient cette mer intérieure de près de 200 mètres et formaient la chaussée d’un lac immense qui s’étendait à l’Est jusque vers Rafaï et Djabbir.

Ce lac a débordé, son déversoir s’est créé un lit qui s’est approfondi, et peu à peu le niveau du lac a baissé. Bientôt de hauts-fonds sont apparus ; les chaînes de Mobaye, de Cetema, de Ouango ont émergé, et le lac primitif s’est divisé en quatre ; plus tard, en aval de Mobaye, le lac qui s’étendait en amont de Mokouangay, s’étant vidé en partie, trois petits lacs, dont on voit très bien les cuvettes, se sont formés entre Pingué et Mobaye.

S’il nous avait été possible de sillonner d’itinéraires la rive droite de l’Oubangui, nous aurions cherché à délimiter le contour probable de ces lacs. Mais comme l’intérieur n’a été parcouru par aucun blanc, il nous est impossible d’indiquer, même d’une façon approximative, leur étendue. Il est à remarquer que de l’autre côté de l’Équateur, aux sources mêmes du Congo, le pays présente un aspect analogue à celui que l’Oubangui offrait autrefois. Sur le Loualaba ou Kamolondo, on a découvert un chapelet de huit lacs, qui, eux aussi, disparaîtront à leur tour.

Un peu au-dessus du rapide de l’Éléphant, l’Ombella et la Kémo débouchent sur notre rive. M. Ponel les avait indiquées à M. Crampel comme des voies possibles de pénétration vers le Nord. Il aima mieux partir de Bembé et pousser dans la direction d’El-Kouti, mais ses successeurs Maistre, Gentil, ont utilisé la deuxième, qui, grâce à son affluent, la Tomy, nous permet d’at-