Page:Bruel, L'Oubangui, voie de pénétration dans l'Afrique centrale française, Plon, 1899.djvu/4

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apportent leur concours précieux à cet enseignement de la vérité coloniale. Nos lecteurs les retrouveront plus d’une fois dans notre collection. Et cette propagande portera ses fruits, nous en sommes persuadé.

Quant aux détracteurs de l’activité coloniale, ils sont peut-être excusables. L’ignorance des faits crée des jugements erronés. Ce n’est pas en France seulement que l’on apprécie inexactement ce que l’on connaît mal. Ne lit-on pas dans les Lettres de Gordon-Pacha, qui périt à Khartoum, assassiné par les mahdistes, ce passage bien curieux à propos de l’exploration des sources du Nil : « Après tout, je me soucie fort peu de savoir s’il y a deux lacs ou s’il y en a un millier, si le Nil a deux sources ou s’il n’en a point. Il m’est absolument indifférent d’apprendre qu’il y a là-bas des races noires, vertes ou bleues. Si j’étais condamné à me voir encaissé pendant quinze jours dans un vapeur de cinquante pieds de long j’aimerais autant mourir de suite. On ne m’a pas payé pour faire des explorations. Je ne vois pas pourquoi j’endurerais des privations et des fatigues pour satisfaire la curiosité d’un tas de savants que je ne connais point. Votre Afrique est un pays détestable avec ses moustiques, ses brousses et ses naturels qui ne changeront pas d’habitudes et qu’aucun mortel ne civilisera. Je l’ai en horreur ce pays d’insectes, de marais, de forêts et de misère, et, je le répète, je ne vois pas pourquoi je me sacrifierais pour quelque géographe. »

Plus tard, Gordon changea d’avis. Il donna sa vie pour civiliser l’Afrique.

Cette civilisation s’accomplira. Le vingtième siècle la verra, suivant toute vraisemblance. Elle s’achèverait plus tôt si l’équilibre africain pouvait se maintenir. Pour cela, que faut-il ? Moins des traités que des travaux. Les voies de pénétration vers l’Afrique centrale, comme celle de l’Oubangui, y aideront considérablement. On s’en convaincra en lisant les pages que nous devons à M.  Georges Bruel.

Charles Simond.