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MUSIQUES D’HIER ET DE DEMAIN

terrible de la vie. L’un et l’autre, en dépit de leurs tempéraments et de leurs systèmes très opposés, — Mozart exigeait que la poésie restât la fille obéissante de la musique, — ont atteint le même but, fixant les bases essentielles du même art : vérité de l’expression, liberté de la forme.

Aucune œuvre mieux que Don Juan ne déterminera plus rigoureusement ces deux principes qui régissent le drame lyrique moderne. Sans doute, la partition étant divisée en morceaux reliés par des récitatifs, nous n’y trouverons pas l’unité du langage musical qui est de règle aujourd’hui, mais, je le répète, les moyens si nouveaux employés par Mozart se sont renouvelés comme se renouvelleront les moyens employés à cette heure — car rien ne reste stationnaire, sous peine de déchéance — mais le fond demeurera identique. Depuis l’ouverture, se rattachant au premier acte, tout comme les préludes de Wagner, et qui expose superbement le double caractère tragique et comique de l’ouvrage, jusqu’à la bouleversante scène finale où les thèmes du début éclatent dans le magnifique et terrifiant fracas des trombones, on ne peut découvrir la plus petite défaillance de volonté dans l’application des préceptes auxquels obéirent et obéiront toujours les musiciens de