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MUSIQUES D’HIER ET DE DEMAIN

Mais, après les appels joyeux des matelots annonçant son arrivée, Tristan a paru, et la musique devient ici d’une prodigieuse grandeur, d’une énergie sans égale.

En des répliques, mesurées d’abord et de plus en plus haletantes, le conflit s’engage et se poursuit jusqu’au moment où Iseult saisit la « coupe de réconciliation » et partage avec Tristan le breuvage qu’elle contient.

À peine ont-ils bu qu’un délirant bonheur les rive aux bras l’un de l’autre. Brangaine a désobéi, et c’est le philtre d’amour qu’elle a versé. Le navire va toucher terre. Une ivresse surhumaine, une folie de désirs secouent l’orchestre dont les flammes envahissantes dévorent et torturent, tandis que les deux voix unies chantent l’hymne éperdu auquel succède, en une éblouissante péroraison instrumentale, le chœur des matelots saluant le Roi.

Dans un jardin, devant sa demeure, par une lumineuse nuit d’été, Iseult écoute maintenant des fanfares qui s’éloignent. Sur un délicieux murmure des clarinettes et des violons, les cors résonnent en échos vaporeux et le hautbois dessine une douce phrase impatiente. Bien peu partagées sont les craintes de Brangaine ; Marke chasse dans la forêt et Iseult, éteignant la torche qui brûle à l’entrée de la maison, dernière lueur